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CHANTAL



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vendredi 17 février 2012

ENFER OU PARADIS par Chantal

LES PERVENCHES…….SUITE…..

Me voici devant une dame sans âge, entre soixante dix et soixante quinze ans ! Peut être plus…Elle est habillée simplement, sans élégance, et porte des pantoufles qui ont longuement servi. Sur ses épaules, elle a mis un châle noir qu’elle a du tricoter jadis. En effet, elle passe son temps à tricoter. Pour elle, ou pour les autres qui parfois lui commandent un cache nez ou un petit bonnet. Elle est gentille avec tous les autres pensionnaires, même avec ceux qui l’ignorent !
Je m’approche d’elle :
-          Madame ? Puis je vous demander de me raconter votre vie car je fais un livre sur les retraités …
-         Elle hésite un moment, ne désirant pas me répondre. Puis, elle me dit :
-         Venez dans le jardin, je vous parlerai plus librement. Ici personne ne sait qui j’étais. On se moque de notre passé bien sûr.
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Voilà, vous n’imaginez pas quelle a été ma jeunesse et ma vie ensuite ! En 1950, je « suis tombée enceinte » comme on disait. J’avais 15 ans ! M’étant éprise d’un garçon de ma classe, nous avions commis l’irréparable sans le savoir vraiment. Insouciants et amoureux, nous n’imaginions pas les conséquences de ce petit moment de bonheur. Par contre, dès que je compris que j’étais enceinte, je fus prise de panique, et attendis le cinquième mois pour en parler à mes parents. Cela se voyait un peu et ils me disaient de moins manger, car je prenais des rondeurs…Mon amoureux était parti à Paris avec ses parents et je ne le revis jamais. Finalement, comme je vomissais beaucoup, ma mère me regarda méchamment et me dit : Tu n’es pas enceinte au moins ???
-         -  Oui, Maman, je pense que je suis enceinte depuis cinq mois.
Elle me flanqua une gifle qui me fit basculer contre la porte. Puis elle sortit en parler à mon père. Quand ils revinrent vers moi ce fut pour me dire de partir avec mon séducteur, de quitter leur maison honorable. Je me mis à pleurer, à trembler, à demander pardon, mais rien à faire, j’étais chassée.Je n’eus que la matinée pour faire ma petite valise, ramasser mes affaires de classe, prendre le billet de train offert pas mes parents pour aller chez une vieille tante qui me prendrait comme bonne…
J’étais anéantie, je ne connaissais pas cette dame et je voulais continuer mes études pour un jour élever mon enfant.
Arrivée chez cette vieille dame, je compris que j’allais vivre un enfer.
 Sans me dire bonjour, sans me demander si j’allais bien, elle me fit signe de monter au second déposer mes affaires dans la chambre mansardée. Quand je vis ce vieux lit, avec un matelas usé, des vieilles couvertures, une minuscule fenêtre donnant sur la cour, une vieille armoire pleine de vieux vêtements, une chaise bancale et un bureau sale, je m’effondrais sur le lit et me mis à pleurer en gros sanglots. Mais en même temps, j‘entendais :
-         Alors, tu descends ? Tu en mets du temps pour t’installer…
-         Comment t’appelles-tu déjà ? Ah oui, Caroline…Bon ce sera CARO pour moi…
-         Bien Madame, que dois-je faire pour vous ?
-         Tu feras les courses, le ménage, la cuisine et tu me feras aussi la lecture le soir.
Dans mon état, je ne pensais pas être capable de faire tout cela longtemps. On verrait bien…Que pouvais-je faire ? Accepter, subir, expier ma faute !
Pendant un mois, je fis de mon mieux pour satisfaire ma vieille tante Justine. Elle n’était pas méchante, juste vieille fille, acariâtre, boitant un peu à cause d’une poliomyélite jadis. Elle parlait peu avec moi, me commandait plutôt. J’acceptais tout…Elle ne recevait personne. Quand j’avais un moment de repos, je me remettais à mes études.
En faisant le ménage, j’avais remarqué des livres de chimie et mathématiques, ainsi que des livres de sciences naturelles. Je n’osais pas les consulter. Je voulais m’instruire pourtant.
Un soir, alors que nous finissions notre petit repas... que j’avais soigné, elle me félicita, ce qui me surprit…
Du coup, je fus prise d’un culot incroyable et lui dit :
-         Pourrais-je vous emprunter vos livres, car je désire finir mes études ?
Elle se tourna vers moi et me dit :
-         Tu ne veux tout de même pas que je te donne des cours particuliers aussi ?
-         Pourquoi pas… ma tante ?
Cette familiarité la surprit et elle esquissa un petit sourire, une sorte de grimace, en fait. Mais, je sentais qu’elle était ravie que je désire apprendre.
Puis elle partit se coucher sans un mot. Moi, j’étais plutôt contente. Je ne vomissais plus, je faisais mon petit travail tranquillement et le bébé commençait à bouger, ce qui me ravissait.
Quelques jours plus tard, je vis ma tante, avec une pile de livres sur son bureau, et des cahiers, des stylos, des crayons et un vieux tableau noir devant la cheminée. Elle avait tout amené pour me faire travailler le matin après le petit déjeuner. Ma joie était immense et je lui sautais au cou, ce qui la fit se reculer un peu.
-         -  Excusez-moi, je suis si heureuse d’apprendre, d’avoir un jour un beau métier !
Elle ne m’écoutait pas et ouvrait un livre de mathématiques de la classe de troisième et me dit :
-         Allez, on va voir où tu en es ! tu vois cet exercice ? Fais le en une heure…Attention j’ai été professeur…
Une heure après, elle revint, avec une tisane, et prit mon cahier sans rien dire. Je la regardais avec tendresse, elle avait mis ses vieilles lunettes et corrigeait mes erreurs.
-         C’est assez bien CARO, tu n’as pas trop oublié ce que tu as appris. On va voir avec les sciences.
C’est ainsi que débutèrent mes cours particuliers durant la fin de ma grossesse.
En juillet, je pourrai me présenter au brevet, je pense. Ma tante était plus abordable et je commençais à l’aimer un peu plus chaque jour. Elle avait, avec mon aide, changé ma « turne », en chambre correcte. Elle avait ressorti, de beaux draps et un beau dessus de lit. J’avais même un vieux tapis persan fort joli. Bref, ma tante m’avait adoptée en fait. Je vivais presque heureuse avec elle. Mes parents ne prirent jamais de mes nouvelles et n’envoyèrent jamais d’argent à leur vieille tante. Cela me rendait vraiment triste. Je voulais leur écrire, mais n’osais pas.
Je décrochais mon brevet sans peine grâce aux bons conseils de ma tante Justine, et tous les élèves regardaient cette jeune femme enceinte de huit mois qui allait et venait comme eux…
Ma tante fut plus heureuse que moi je crois et m’embrassa avec tendresse, en me serrant dans ses bras. Elle sentit mon bébé bouger et elle se mit à rire, ce qui ne lui arrivait jamais.
-         Maintenant CARO, tu vas te reposer, et attendre le bébé tranquillement à la maison. Nous ferons venir le Docteur BELON qui t’accouchera, c’est un vieil ami à la retraite.
-         Merci ma tante pour tout ce que vous avez fait pour moi et pour le bébé. Jamais vous ne m’avez jugée ou réprimandée. Vous m’avez transmis votre savoir, et si j’avais peur de vous au début, à présent, je suis ravie de vous avoir connue.
Un mois après, j’accouchai d’un superbe poupon de 3 kilos Tout se passa très bien et rapidement devant les yeux émerveillés de ma tante et de son ami le vieux docteur.
Malheureusement ma tante fit une crise cardiaque fatale un mois après. J’étais désespérée, triste, je l’aimais beaucoup…Qu’allais je devenir ?
Je m’occupais du bébé, facile à vivre, et faisais quelques ménages pour me payer ma nourriture. J’avais droit à quelques sous pour le bébé, mais si peu…
Un jour j’eus la visite d’un notaire, qui voulait me parler.
Il m’apprit que ma tante me léguait tout ce qu’elle possédait avec la maison. Elle avait même souscrit un livret de caisse d’épargne pour le bébé. Je regardais le notaire, sans y croire…Moi qui croyais vivre un enfer avec ma tante jadis, je vivais au paradis ! Quelle femme extraordinaire j’avais connue à cause de ma grossesse. Mon bébé s’appellerait JUSTIN.
Quand à mes parents, furieux de cette situation, ils m’envoyèrent une lettre pleine de haine…Comme c’est affreux d’avoir des parents rancuniers et méchants, peu compréhensifs. J’avais coupé les ponts, et ne les revis jamais.
Ma vie était simple, je travaillais dans un petit restaurant : mon salaire était suffisant pour vivre à deux.
La maison de ma tante était spacieuse et le petit jardin agréable.
Des années après, Justin avait bien grandi et m’aidait à rajeunir la maison. Il avait seize  ans, et nous voulions changer la maison en maison d’hôtes. Il était apprenti cuisinier et comptait m’aider plus tard. C’était un beau projet, sûrement rentable.
Je n’avais pas refait ma vie, je n’avais jamais connu d’autre homme, je ne vivais que pour mon enfant et son avenir. Il travaillait bien et m’adorait.
Voilà, j’ai passé trente ans de ma vie à tenir cette pension ou chambres d’hôtes et ensuite, mon fils s’est marié et avec sa femme il a rénové la maison et en a fait un bel hôtel-pension. Ma vie était parfaite, mon enfant, nullement désiré au début, faisait ma joie. Me sentant vieillir, avec mon fils, nous avons cherché une bonne maison de retraite et je suis venue ici à deux pas de la maison de JUSTIN.
Je repense parfois à mon petit moment de bonheur, avec mon amoureux dont j’ai oublié le prénom, et je me vois ensuite, avec toutes les joies que j’ai eues, je me dis que le bonheur est encore de ce monde…Tante Justine, vous m’avez redonné le goût de vivre et d’aimer…
Vous voyez, Madame, ma vie était mal partie et me voilà heureuse à mon âge.
Pour m’occuper, je tricote, mais je ne fais plus la coquette, je suis fatiguée, je suis vieille…Quand j’attends la visite de mon fils, de sa femme et de leur jumeaux … Je me fais belle…
Au revoir Madame, j’espère ne pas vous avoir ennuyée…


CHANTAL LECLERC ………………droits réservés

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