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CHANTAL



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mardi 17 août 2010

FICTION...




A SEPT ANS JE SUIS MORT… de Chantal LECLERC

J’ai maintenant l’âge de la retraite et quand je revois toute ma vie bien remplie, je me dis :
A SEPT ANS JE SUIS MORT…
En effet, j’étais comme tous les enfants de sept ans assez turbulent et remuant et je faisais tout ce que faisait mon frère de quatorze ans. Je l’admirais, je l’enviais aussi. Il travaillait très bien en classe et jurait qu’il serait chirurgien plus tard. Moi je voulais être chauffeur de taxi. Nous nous entendions bien et il était patient et m’apprenait des tas de choses, m’emmenait partout, dans les musées, les jardins où il me faisait un cours de botanique, il choisissait mes lectures et savait trouver ce qui pourrait m’enrichir…Il s’était inscrit à un cours de tir au pistolet et j’allais avec lui pour le regarder avec ses professeurs. Il m’expliquait le maniement des armes et me disait qu’il fallait être très prudent.
Ce qui devait se passer arriva un après midi : Il rentrait du Lycée et j’étais caché derrière un rideau avec le pistolet de mon père. Il n’eut pas le temps de réagir quand je criais « haut les mains ! » Je tirais au hasard quand il s’avança pour me désarmer sans doute…Il reçu la balle en pleine tête et s’écroula immédiatement. Je restais là, incapable de bouger, le pistolet dans ma main droite. Le sang s’écoulait lentement de son crâne. Le bruit réveilla mon père qui sommeillait devant la TV ! Mon Père arriva en courant, et muet devant ce spectacle de ses deux enfants immobiles, il comprit et s’agenouilla pour constater la mort de son ainé ! Moi j’étais tétanisé, je ne pleurais pas, je regardais par terre sans comprendre la gravité de mon geste. Alors, je vis mon père me prendre dans ses bras et me serrer en me disant : C’est de ma faute, je n’ai pas rangé le pistolet ! Ton frère n’a pas souffert…Il dort pour toujours…Viens avec moi, on va parler tous les deux.
Durant quelques minutes, calmement, il m’a parlé de la vie et de la mort, sans une larme, sans un reproche, sans colère contre moi…J’étais toujours hébété et incapable de pleurer. Mon frère et moi vivions seuls avec notre père depuis longtemps. Ma mère était décédée un an après ma naissance. Mon père avait pris une nurse pour nous élever convenablement. Nous étions maintenant seuls tous les deux et Miss Morris était partie pour son week end ! Quand mon père me laissa sortir de la chambre où nous avions parlé, je me sentis attiré par mon frère couché à terre. Je le regardais inerte, la figure dans une marre de sang et je ne sais pourquoi je m’étendis près de lui tendrement et l’entourais affectueusement en lui parlant tout bas à l’oreille : Pardon Pierre, Pardon…Je ne savais pas que le pistolet était chargé…Pardon…Je t’aime, Je serai TOI toute la vie et tu vivras toujours ! Je ne pleurais pas, c’était impossible.
Bien sûr mon père appela la police et expliqua le drame, sa maladresse, son imprudence, et finalement l’affaire fut vite classée…Pour l’enterrement ce fut un défilé d’amis et de famille et tout ce monde me regardait sans gentillesse en général. Sept ans, j’étais encore fragile, mais j’avais brusquement grandi et je percevais les reproches et la colère de certains ! Mes camarades de classe et ceux de mon frère ne cessaient de me dévisager. Ils étaient curieux, et répétaient ce que leurs parents disaient chez eux sans doute : « Tu es méchant, tu as tué ton frère ! On ne veut plus te voir. »
Je n’avais plus de copains, et en plus je devais aller chez une psychologue tous les mercredis pour me suivre et voir comment je réagissais ! Mon père m’entourait et Miss Morris après des torrents de larmes, me témoigna une gentillesse qui me fit du bien. Jamais elle ne me fit le moindre reproche. Elle m’apprit le dessin et l’aquarelle pour me distraire. Elle parvint même à me faire faire un portrait de Pierre d’après une photo. Je m’étais tellement appliqué que son visage était presque ressemblant. Je regardais mon œuvre avec amour et brusquement je me mis à pleurer et à sangloter sans pouvoir m’arrêter. C’est seulement là que je compris que Pierre était vraiment MORT.
Des années passèrent et j’étais toujours seul et casanier et les études m’accaparaient. J’avais décidé d’être chirurgien comme Pierre l’aurait voulu. Je n’étais pas aussi doué que lui et devais travailler plus que les autres étudiants. Je ne sortais jamais et n’avais pas de petite amie. Mon Père s’était remarié et sa femme était charmante : c’était mon ancienne psychologue ! Elle me suivait toujours, mais en fait j’allais bien…En apparence…
Devenu chirurgien de la face, j’avais un travail fou et cela me plaisait. Je menais une vie de moine ou presque et refusais de me marier ou d’avoir des relations avec une femme : c’était une sorte de punition que je m’octroyais ! Cela ne me privait pas du reste. Je l’avais décidé à l’adolescence. Par respect pour Pierre qui n’avait pu réaliser ses rêves à cause de moi. Je me donnais à mes patients et à mon frère. Lui seul comptait à mes yeux. Il était en moi. Cela me permettait de vivre. J’avais failli me suicider jadis en comprenant ma bêtise puis, j’avais fini par comprendre que je l’aurais tué une deuxième fois. Il me fallait vivre SA vie et la mienne en même temps : ne faire qu’une seule personne. Je vivais ainsi depuis des années. Personne ne se souvenait de mon drame et maintenant que je vivais à PARIS, j’étais un chirurgien comme un autre.
Avec les accidents de la route je voyais des cas très graves et parfois j’étais bien incapable de réparer la face ou d’abréger les souffrances de gens qui mouraient dans les heures qui suivaient leur arrivée. On me disait bon chirurgien et je faisais mon possible pour apprendre les dernières nouveautés. Je n’avais pas une minute à moi en dehors de l’hôpital. Parfois je jouais du piano, je m’y étais mis tardivement, une détente solitaire, et j’adorais CHOPIN, comme Pierre. Alors, je pensais à lui et jouais pour LUI. J’étais heureux, en communion.
Un mardi, oui, je me souviens, c’était un mardi…On amena un enfant dans mon service en urgence : Il venait de recevoir une balle perdue dans le crâne et était donné pour mort ou presque. Après une émotion intense, je me mis au travail avec mon équipe pour sauver ce pauvre petit qui me ramenait longtemps en arrière. Bien secondé et bien entouré, je savais que notre équipe sauverait cet enfant. A moi d’être à la hauteur, et je mis des heures à parvenir à un résultat satisfaisant. Toute l’équipe me félicita et je sentis une joie intérieure m’envahir. « L’enfant vivra sans séquelles, il n’aura pas trop de cicatrices. Redonner la vie, revoir le sourire de cet enfant plus tard me rendra moins coupable. » J’étais soulagé…
Je revis des tas d’autres cas dramatiques, mais j’étais toujours plus marqué par les accidents des enfants. A chaque fois, je revivais mon drame et soixante ans après je n’arrive pas à oublier le visage de Pierre se penchant pour me désarmer. J’oubliais de dire que mon père qui s’estimait autant coupable que moi, m’avoua un soir, que toutes les nuits il revoyait son fils à terre inerte. Depuis ce drame, il s’était séparé de toutes ses armes auxquelles il tenait comme à la prunelle de ses yeux. Une chose le hantait : Pourquoi avait il oublié de fermer à clé le placard aux armes ? Pourquoi ? Pourquoi le pistolet était il chargé ? L’enfant avait il lui-même chargé l’arme ? Il ne se souvenait plus. Quelle culpabilité ! Peu avant sa mort, il dit « Pardon PIERRE…J’arrive… »
Voilà, pour quelques secondes de bêtise, d’imprudence, de naïveté : trois vies abimées, une enfance brisée, un avenir difficile …C’est ce que je me dis en lisant le journal et les faits divers tragiques.
Je n’opère plus depuis quelques années ! Je suis un vieux garçon, je joue du piano et me suis mis à l’orgue et je joue dans les églises, cela me remplie de joie et ma vie me semble moins triste.
« Pierre tu vis en moi, tu es moi, nous sommes comme des jumeaux… »

INVENTION DE
Chantal LECLERC (droits réservés)

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